Il y avait la maison de Peggy Guggenheim, à Venise, désormais musée, qui nous permet d’appréhender l’extraordinaire bonheur que cela devait être de déjeuner face à un Kandinsky, ou de dormir dans un Calder (tête de lit). On ne saura pas exactement ce que procura comme émotions la salle à manger de l’appartement de Jacqueline Delubac, quai d’Orsay, où un Bacon se livrait à une passe de corrida… mais on peut allègrement l’imaginer. Tout comme le salon qui accueillait des Picasso, Miró, Renoir… grâce à cet admirable album qui nous en laisse deviner tout l’éclat des possibles…

Désormais seul témoin de l’exposition qui vient de fermer ses portes au musée des Beaux-Arts de Lyon, il nous plonge dans l’histoire de cette grande dame des Arts, elle-même actrice renommée dans les années 1930-1950.

 

Ayant légué la totalité de sa collection au musée, Jacqueline Delubac se révéla une artiste audacieuse quant à ses choix portés par une curiosité passionnée et un don à détecter et à célébrer l’innovation et la créativité.

Deux adresses vont marquer cette folle époque, deux appartements-musées : celui du 18 avenue Elisée-Reclus, le temps Sacha Guitry, si l’on peut dire. Puis, le 83 quai d’Orsay comme l’apothéose des caprices dans un enchainement d’œuvres hétéroclites mais totalement enchevêtrées par un canevas harmonieux qui fit de ce lieu un joyau.

 

Jacqueline Delubac rejoint, au musée des Beaux-Arts de Lyon, une série de femmes collectionneuses qui ont choisi ce lieu comme écrin pour leur collection. Après Juliette Récamier (1849), la marquise Visconti (1916) et Florence Marinot (1963) notamment, Jacqueline Delubac se taille une place importante par la qualité des œuvres offertes : Monet, Manet, Renoir, Degas, Bonnard, Vuillard, Léger, Braque, Picasso, Bacon, Hartung, Rodin.

 

Construit en deux parties, cet album nous dépeint la vie trépidante des œuvres acquises par cette femme libre qui, du théâtre au cinéma, mena parallèlement une vie personnelle sans jamais renier son dessein.

 

François Xavier

 

Jacqueline Delubac, le choix de la modernité, Actes Sud/Musée des Beaux-Arts de Lyon, 200 x 260, novembre 2014, 245 p.- 29,00 €