Sylvie Maurice et les crépuscules

Sylvie Maurice règne en maîtresse sur le domaine des ombres rasantes puisque c’est là que ses oeuvres trouvent toute leur ampleur. Elles entretiennent alors avec l’ombre de « coupables » rapports. Des présences secrètes ne s’y révèlent par les clartés furtives qui s’accrochent à la saillie ou à la nervure des ailes d’acier. Elles prennent les lueurs d’étain de l’aube ou les accents cuivrés du crépuscule. L’artiste donne au rêve prétexte et nourriture. Au rêve mais aussi à la réalité. Son regard demeure fixé sur ses graines, toupies lointaines qu’elle seule entend vrombir tandis que son bras les fouette - mais pour les caresser.

 

Entre chien et loup, comme entre la lèvre et le baiser,  Sylvie Maurice telle une nouvelle Yadwigha déploie leurs ailes de ses créations à l’heure où s’engourdissent les sens communs. Pourtant l’artiste n’ignore rien de ce qui - fuyant les duretés du jour -  va connaître dans un paradoxal abandon une intense existence. C’est le moment entre tous favorable à l’enchanteresse : se relâchent les mailles de la vigilance. La peur se redresse dans les jardins. Dans leur verdure éteinte elle plante ses graines telles des fantômes aussi durables que réels. Puis, rentrant dans sa demeure, elle va regarder "Crépuscule à Tokyo" d’Ozu sur son canapé rouge.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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