Tina Lugo et les cérémonies du chaos

Les dessins de Tina Lugo aux narrations érotiques aussi nocturnes que colorées ne peuvent que choquer ceux qui ignorent d’où elles viennent. L’influence majeure est tirée du manga comme du mouvement plastique japonais « Ero Guru Nonsensu » lui-même branche extrême-orientale de l’univers anglais de l’érotisme grotesque et nonsensique. L’artiste ose divers types d’exactions très présentes dans la culture traditionnelle populaire du Japon. La sophistication du dessin est « dévoyée» vers des visions d’une cruauté sexuelle presque insoutenable. Ce monde pourrait sembler sans espoir si on oublie l’ironie d’œuvres qui tournent tout à la violence mais surtout à la dérision dans des cérémonies du chaos.

Les choses qu’on voudrait exquises ne le sont pas sauf par leur facture artistique. Tout ce qui génère le mal et la douleur est mis en exergue. Mais qu’on se rassure : un tel piédestal reste celui d’un grotesque inhabituel certes, mais grotesque tout de même. Le cauchemar reste au service du rire. Il arrive à différer Thanatos comme si Eros restait - en dépit des incidents et incidences - le plus fort. La précision de l’artiste paradoxalement soulage. A sa manière Tina Lugo semble dire : « Pardonne leur Seigneur ils ne savent  pas ce qu’ils font ». Si bien que  tout ce qui pourrait sembler terrible devient presque joyeux.

Jean-Paul Gavard-Perret

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