Pierre-Jean Amar : d’ombres et de lumières


 

P-J Amar aime fausser les pistes. Il s’est plu il y a quelques années à proposer sur Facebook toute une série de popotins des plus sexy. Et s’il est vrai que dans une série sur le thème du « drap » il a beaucoup photographié le corps nu son œuvre ne pourrait se réduire à cette seule thématique. D’autant que l’ombre et la lumière a presque plus d’importance que la nudité puisque cette dernière est habillée par les deux premières. S’affirmant sans imagination Amar dit faire confiance au hasard. Mais de fait - le hasard faisant bien les choses ? - une idée surgit très vite et l’artiste la décline de manière systématique comme dans sa série des  « bandes Velpo ».


Désormais le photographe s’oriente de plus en plus de vidéos et réalise des portraits de photographes (Ronis, Brihat, Fessy etc.) Il complète ainsi non seulement son travail de création  mais d’enseignement universitaire d’histoire de la photographie et de commissariats d’expositions. Pendant quinze ans avec « La Photographie à Aix-en-Provence » il a organisé des expositions sur les grands photographes :  de Ronis (Amar a permis de le redécouvrir )  à Capa, de Cartier-Bresson à Bischop, etc.. Elles étaient complétées chaque fois d’une monographie et des conférences sur un thème (le nu, le paysage, le photojournalisme, etc.).


P-J Amar est très critique sur l’avenir de son art. Certes il sait combien l’idéologie a besoin de photographes pour  illustrer et informer. Mais le créateur doute que le métier nourrisse soit financièrement vivable. C’est expédier un peu vite le rôle que joue la publicité (entre autres) pour bon nombre de photographes. Certains savent en tirer profit pour pratiquer en parallèle un activité de pure création. Avedon avait déjà ouvert la voie en exploitant le système de la mode.

 

L’œuvre artistique d’Amar permet d’ouvrir des espaces poétiques où le réel est pris en défaut dans des mouvements de torsion ou d’ellipses qui l’interroge. Chaque photo instruit des  décalages si bien que le monde comme le corps n’est plus directement « habitable » le tout dans une fluidité rythmique et lumineuse. Le monde quoique proche se révèle inquiétant dans une théâtralité particulière. Celle-ci quoiqu’au ras de réel le sublime. Elle « vertèbre » une vision distanciée mais profonde. L’imaginaire développe une épaisseur cachée là où la photographie ne crée pas un monde de façades mais son contraire.  En exhaussant ou en isolant lieux, êtres ou choses l'artiste ramène à ce qui tient du semblable et du dissemblable en des foyers singulier qui nous hantent.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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2 commentaires

clodette

slt je cherche un livre sur l'ombre chinoise ou l'ombre en générale 

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