Romy Alizée et le voile de la nudité

 

 


 

Dans ses autoportraits  traversés par l’ondoiement de tissus aux troublantes transparences, Romy Alizée couvre et dévoile, éloigne et rapproche en annulant l’effet civilisateur du vêtement. Elle questionne le sexe jamais vraiment apprivoisé en érotisant jusqu’aux lois qui  viennent le bannir.  La soie épouse  le corps dans la promesse d’éclore aspirant aux brillants essors. La dentelle ajourée voile un sein qu’elle révèle, offre et refuse, l'étoffe enserre un visage voué à l’exigeante virginité des moniales ou à  l’effroyable humilité de filles déshonorées. Du voile de la nudité surgit des facettes intimes et publiques.

 

L'intimité  ne se remodèle pas selon nature : elle s’enrichit  par superposition de strates L'artiste invite à une fouille archéologique symbolique, savante et brutale. Dans les tréfonds obscurs peut s'y chercher l’image d’une autre femme, qu’on aurait côtoyée peut-être du moins rêvée à l'évidence. Surgit le regard ambigu sur le statut non moins ambigu de la féminité dans une société avide toujours de cloisonnements et de pérennité.  L'artiste nous donne à voir le travail de sape salutaire et délétère de la vraie liberté. Celle qui fonde et qui brise, celle qui révélée tend à occuper tout l’espace et faire le vide autour de soi.

 

Par la nudité à la fois distante et proche Romy Alizée  crée autour d'elle une inflorescence qui la prolonge et l’isole. Le doute se mue en certitude. L'inverse est vrai aussi. C'est comme une stance surréaliste qui habillerait de pudiques fioritures un désir trop humain.  Elle incarne au besoin par effet de noir la veuve joyeuse libérée par mensonge ou  mort de son statut d’infériorité. Elle avance nue dans l'imbroglio d’une passementerie perverse. Elle prend angélique les traits enfantins d’un archétype obsessionnel. L'amour pour elle n'est plus une menace assumée mais un jeu de poupée qui ne craint plus  l’épanouissement éphémère des roses du matin.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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1 commentaire

Étudiante

Je n'aurais pas mieux écrit, camarade.