Carole Pampoulie : poétique des faubourgs
Carole Pampoulie s’attache - entre autres - à définir le territoire suburbain dans toute sa diversité et sa complexité en essayant de réunir les indices de l’espace et des individus. Barres d’immeubles, bidons-villes, territoires en reconstruction, errants et belles passantes deviennent des morceaux choisis qui semblent pris au vol sans souci de cadrage et de pittoresque. Ils sont là pour souligner le chaos urbain selon une approche poétique de cet univers en marge. L’artiste parcourt cet espace à la recherche non de l'insolite mais de l'insondable en ce qui tient d'une traque et d'une dérive au fil des rues et des jours. Pour chaque ville, la stratégie d’approche photographique est définie en fonction de l’histoire et de la topographie du site. Les réseaux denses et chaotiques de la cité donnent lieu à des tirages en noir et blanc échos à la saturation d’espace et ce dans la remise en question du cadrage qui demeure une des clés de leur langage photographique.
L’idée n’est pas d’identifier les lieux dans un travail documentaire : il s'agit, à travers un lieu, de dégager une sorte de symbolique de l'enfermement : centre ou confins de la ville, banlieue. Les photographies gardent une valeur de paysages vus de manière très large ou en champs rapprochés. La ville perd de sa superbe. Elle est autant lieu de vie que de survie. Le corps y est montré comme partie intégrante de la structure architecturale. Carole Pampoulie ne cherche donc pas à montrer un pays aux essences pures et aux gestes parfaits. La "tête contre les murs" l’artiste par ses photographies souligne l'ambiguïté d'un monde qui dévore sans laisser place à une liberté. Dans le corps du ciel ouvert les buildings ne guérissent pas la maladie endémique de l'humanité. Ils la cisèlent un peu plus. C'est une histoire de solitudes, de peaux de diverses couleurs, de chair à cœur ouvert.
Jean-Paul Gavard-Perret
Carole Pampoulie, "Backstage", Editions Corridor Elephant.
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