Pamela Littky & Stefanie Schneider : dans le tombeau d’insignes croisades

                   

 

 

Les œuvres croisées de Pamela Littky et Stefanie Schneider échappent au nom sinistre du « Désert de la Mort » où se situent les prises. Celui-là à la fois précise mais aussi disqualifie (d’une certaine façon) un espace fascinant, mythique et mystique. Au bord Est de la Californie le désert fut le dernier « mur » pour les croisades des immigrés de la ruée vers l’Ouest. Beaucoup y laissèrent leur vie. Mais les survivants, passés l’épreuve de la traversée, troquaient un passé nécrosé pour l’espoir d’un avenir ouvert.

 

Les deux photographes  ne reprennent pas pour autant cette histoire : elles préfèrent saisir le présent de ceux qui habitent les quelques bourgades en marge du lieu. Les photographies transforment pratiquement la vision en destin. S’y traverse des frontières sur la musique du vent en une danse de vie plus que de mort.  Là où la première semble presque impossible elle palpite selon une rythmique particulière. Les gestes deviennent forcément lents. Et les deux artistes les restituent dans la fixité de leurs images.  S’éprouvent l’amour et l’abandon, des jouissances et des douleurs intimes, intérieures, secrètes.

 

Par de telles œuvres nous sommes donc à la frontière non seulement de deux mondes mais d’un qui nous sommes, d’un qui nous devenons. L’examen de conscience que propose par sa force de désert les artistes l’adressent dans un mouvement poétique. Il ramène l’être à l’essentiel.  Là où tout semble fondre sous la chaleur, l’existence remue entre jaillissement et tsunami de températures presque insupportables. Les photographes font sentir autant la réalité qu’une forme de fiction.  Chaque image devient un lieu sobrement lyrique en ses élancements. La matière perd en densité, l'impalpable devient matière. Le regardeur se retrouve aux sources d’un lieu où  la chaleur des sables convoque à la méditation sur le feu intérieur.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Pamela Littky & Stefanie Schneider, « Desert Voices », Galerie De Re, Los Angelès.

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