La Constellation du Chien, ou le "Carpe diem" de Peter Heller

Pour une fois le marketing dit vrai : Coup d’essai, coup de maître que ce premier roman "de plein air" qui entremêle fiction et réalité, réflexions et aventures, frissons et descriptions savoureuses dans un style osé, séquences rythmées à la ponctuation particulière qui démontre qu’avec du talent on peut raconter une histoire extraordinaire et avoir du style.
Signature d’un grand roman !

 

Se situant entre Jack Kerouac et Philippe Djian (très beau travail de traduction), Peter Heller nous plonge dans le chaos, le jour d’après la Fin de Toute Chose. Quelques survivants terrés ici ou là, d’autre errants en bandes, une maladie du sang qui invite à ne pas se mêler aux autres, une sécheresse galopante, l’extinction de la plupart des animaux, villes fantômes, humains déracinés… Alors il faut survivre, ce qui revient, aux pays des armes à feu, à tuer toute forme humaine qui se présente avant de lui poser la moindre question. À ce jeu-là, Bangley est le plus fort : c’est donc lui qui supervise la sécurité du camp retranché fabriqué autour du petit aérodrome et Hig, le narrateur, se contente de rêver de poésie chinoise, d’entretenir le potager, d’aller à la pêche avec son chien… et de surveiller les alentours à bord de la Bête. Le petit Cessna 182 datant de 1956 est toujours opérationnel et le carburant ne manque pas. Une routine s’installe entre le bourru mercenaire et l’aviateur, vieux couple taiseux qui ne compte plus les jours tant les années passent sans plus de souci que quelques visiteurs dézingués au fusil longue portée…

 

Mais demeurent les souvenirs de la vie d’avant. Et se rappellent les désirs d’ailleurs. L’homme est un indécrottable optimiste malgré tout, et à force de survoler les terres désertes, d’écouter la radio de bord, Hig se persuade qu’il y a encore de la vie non contaminée quelque part. Il faut tenter sa chance, aller voir, quitte à passer le point de non retour.

 

Magnifiquement dépeints, aussi bien les territoires sauvages du Colorado que les rémanences ou les fantasmes de Hig, saupoudré d’humour et pimenté d’actions violentes, ce roman pétillant saisi le lecteur et le porte à ébullition dans une transe communicative qui redonne un peu de goût dans ce morne quotidien.
Un roman pour s’évader, se faire plaisir et rêver aussi. Quoi qu’il arrive, quelle que soit la situation, toujours, demain peut être meilleur, il suffit de pousser le nez un peu plus loin, et d’ouvrir grands les yeux et les oreilles.
Le salut vient toujours d’un détail…
Carpe diem, nous rappelle Peter Heller.

 

François Xavier

 

Peter Heller, La Constellation du Chien, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Cécile Leroy, Actes Sud, coll. "Babel", juin 2015, 416 p. – 9,70 €

 

Première parution, Actes Sud, 2013

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