Le Grand Véfour de Guy Martin ou les péchés capiteux

                   


 

Guy Martin, « Le Grand Véfour », Collection : Cuisine et vin éditions du chêne, Paris 256 pages.

 

Non seulement Guy Martin en reprenant « Le Grand Véfour » redonna tout le lustre perdu à ce haut lieu gastronomique et culturel parisien mais  il en fit et en fait l’endroit où la cuisine la plus innovante - au sens le plus profond du terme -est de mise. Guy Martin est en effet un artiste : il parcourt le monde comme l’histoire à la recherche de saveurs perdues ou inconnues. De la cour des Contes du Royaume de Savoie-Piémont aux îles japonaises les plus reculées il retrouve des fragrances gustatives au sein d’hybridations porteuse d’émotions inédites.

 

Mais le savoir-faire de Guy Martin se double d’un savoir  tant sur la cuisine que sur les arts. C’est pourquoi le Grand Véfour retrouve désormais ce qu’il fut à l’origine et que l’auteur rappelle. S’y croisent à nouveau bons nombres d’artistes contemporains internationaux. Ils ne viennent pas là pour jouer les « people » mais parce que dans le lieu  le chef sait organiser certaines rencontres  a priori improbables. Elles permettent à de nouveaux enjeux et projets plastiques de voir le jour.

 

En rien poseur de collets-montés ou réajusteur des lorgnons pour critiques gastronomiques qui ne voient pas plus loin que le bout de leur fourchette. Guy Martin est le digne successeur des grands artistes surréalistes. On le sent même capable d’utiliser le fameux couteau sans manche et dont il manque la lame. Le Savoyard offre donc au Grand Véfour (comme au « 68 »  Champs Elysées et dans ses autres restaurants) des péchés capiteux. Digitales et sensitives ses créations font saliver les filles, si bien que dans une atmosphère postmoderne toutes possèdent  un nouveau prénom : Ondine. Mais par forcément aux chandelles.

 

Avec Guy Martin la cuisine et sa mise en scène excluent les appâts rances, elle revisite les codes dans des perspectives jamais closes. C’est pourquoi les artistes (plasticiens, musiciens) du temps aiment à se retrouver au Grand Véfour. Son chef leur propose une cuisine qui ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd et un humour qui fait de leur palais un lieu où l’infini ne reste jamais sur sa faim. Il suffit de lire les 50 recettes que l’auteur donne dans son ouvrage afin de comprendre comment le Carpe Diem du plaisir gustatif  se double de la plus sublime éclipse avec un simple œuf sur le plat.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

 

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