Quand la nudité se moque d’elle-même : Sue Rynski

L’œuvre de Sue Rynski propose des hypothèses vagues que n’aurait pas reniées un Beckett. Comme lui la photographe ne peut songer à la grâce vu les drôles d’  « anges » en circulation dans son univers.  Et si souvent les œuvres d’art sont considérées comme de vieilles dames outrageusement maquillées, au sourire un peu trop victorieux, figé et vaniteux, chez l’Américaine il n’en va plus ainsi. Son œil oblique et ses croyances troublées font bouger bien des lignes en des travaux photographiques qui deviennent des  principes de  précipité  et de passage. Un mixage de scène « off » ou « on » stage  créent des porches des plus incertains. Les œuvres multiplient les doutes et les ouvertures (possibles mais jamais certaines) de sens probablement « stoned ».


L’objectif de l’œuvre est autant de spatialiser le temps que de temporaliser l’espace et de décorseter la notion même de langage et des signes ostentatoires d’une forme de « gloire ».  La créatrice désoriente bon nombre d’idées reçues sur la photographie comme sur la musique. La « pop-star » n’est plus parée de plumes.  Elle est même arrachée au règne de son propre spectacle et de la culture-séduction même si au besoin elle peut encore jouer avec une fois les feux de la rampe éteints. Il s’agit  de mettre le feu au regard, de discréditer toute image acceptable avec cet instrument d’imprécision, de torture et de musique qu’est la photographie. Après le passage de Sue Rynski il restera  aux nettoyeurs matinaux de retrouver au milieu des nuages d’alcool des déshabillés compliqués et oubliés. Surgit ainsi dans l’œuvre un nouveau réalisme mâtiné de déconstructivisme.


Jean-Paul Gavard-Perret


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