La nuit des trente : pirouette & patatras !

Ludovic Escande avait pourtant marqué l’année 2014 avec l’extraordinaire Vie privée d’Olivier Steiner et le non moins dérangeant L’oubli de la toute jeune Frederika Amalia Finkelstein. Ici aussi, il s’agit pourtant bien d’un premier roman qui aurait pu nous laisser une douce sensation pimentée après l’avoir refermé. Or nous avons l’impression d’avoir perdu notre temps. Où donc a bien pu aller se cacher l’esprit si particulier qui habitait cette collection unique chez Gallimard que créa Gérard Bourgadier en 1988 ?

 

Ce que nous propose Éric Metzger relève du tronc commun, de cette veine d’autofiction si péniblement inutile et qui aura contaminé le roman français depuis trop longtemps pour que nous puissions continuer à le tolérer. Remarque que me confirmait pas plus tard que mercredi dernier Lakis Proguidis, le fondateur de L’Atelier du roman (Flammarion) qui, cela dit en passant, n’a jamais entendu parler de Nicolas Rey, dernièrement promu personnage romanesque (ce qui est tout aussi réconfortant que confirmant sa totale implication dans la littérature) et qui œuvre avec persévérance à garder le temple intact malgré les coups de boutoir des services marketing qui ont pris en otage les comités de lecture. Lesquels, s’ils avaient fait correctement leur travail, auraient rejeté ce tapuscrit au prétexte que son auteur n’a aucun style ni idée nouvelle mais seulement de grandes oreilles qui lui ont permis de récolter quelques informations, ici et là, historiettes rassemblées dans un fatras aux allures de bluette métro-sexuelle, comme disent les inventeurs de ces fameux éléments de langage qui fleurissent dans les dîners en ville par celles et ceux qui ont le seul dessein de faire l’intéressant…

 

La nuit des trente est donc le roman bobo qui ouvre l’année 2015 avec le récit de Félix, cadre frétillant qui souhaite se brûler les ailes sous prétexte qu’il a trente ans ce soir. Cela tombe bien, c’est vendredi, il s’enfoncera jusqu’au bout de la nuit, d’abord en suivant ses collègues de bureau pour un verre, puis rejoindra un ami en boîte, tiendra des propos prétentieux et jouera les pédants, tentera des approches décalées avec de très jeunes et jolies filles, se fera virer par la sécurité après avoir provoqué une altercation avec un petit ami jaloux, se fera arrêter pour conduite en état d’ivresse, prendra la fuite, rejoindra la première fille draguée en début de soirée, refera le monde et dormira chez elle chastement sous la couette pour rentrer, penaud, chez lui, au petit matin et… accompagner ses enfants à l’école. Vous avez raison, la fin est pathétique…

 

Ce sont donc bien cent pages de platitude décrivant une micro-crise de la trentaine vécue par un jeune adulte qui nous sont racontées sans la moindre fantaisie ni inventivité. Style abscons, situations caricaturales qui frisent le ridicule – on touche le fond quand il rencontre une bande de vieux quinquagénaires alcoolisés dans un bar de nuit qui l’invite à leur table et s’invectivent devant lui.

Passons très vite à autre chose.

 

François Xavier

 

Éric Metzger, La nuit des trente, L’Arpenteur, janvier 2015, 112 p.- 10,90 €

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