« Le sexe ni la mort » d’André Comte-Sponville, ou la philosophie de l’amour sous toutes ses formes

Le Sexe ni la mort, d’André Comte-Sponville, n’est pas un livre érotique, encore moins un livre sur la mort… Le philosophe propose un essai sur l’amour et la sexualité. L’homme est un animal érotique. Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement : le sexe est un soleil ; l’amour, qui en vient, s’y réchauffe ou s’y consume. L’essai est divisé en 3 parties : L’amour, Le sexe ni la mort et Entre passion et vertu. 


Ces différents chapitres questionnent sur ce qu’est l’amour, la sexualité, le couple, l’érotisme, mais aussi sur ce que veut dire aimer, et faire l’amour. L’amour est décliné sous toutes ses formes, amour amoureux, amour fraternel, amour inconditionnel. Très pédagogique, Comte-Sponville émaille son discours amoureux de références philosophiques, ce n’est jamais ennuyeux, et même plutôt amusant. Ainsi nous interroge-t-il sur notre posture lorsque nous finissons d’être amoureux : « Dès lorsque vous n'êtes plus amoureux (dès que l'autre aura cessé de vous manquer), vous n'aurez plus, pour le dire en termes philosophiques, qu'un seul choix : soit vous allez tomber de Platon en Schopenhauer, et cela fait mal (pour ceux qui n'ont pas lu Schopenhauer, on peut dire que vous allez tomber de Platon en Michel Houellebecq : cela revient au même, puisque ce romancier est un disciple de Schopenhauer, sauf que cela fait encore plus mal), soit vous allez monter de Platon en Aristote, de Platon en Spinoza. »

 

C’est assez savoureux, à condition d’avoir quelques notions de philosophie, évidemment. Il n’est pas nécessaire cependant d’être très érudit en la matière, Comte-Sponville ne manque pas de prendre des exemples concrets et de les expliciter, en se nourrissant de ses expériences intimes.


Je m’arrête à ses pages sur l’érotisme. « Le sexe ni la mort ne sont proprement humains. L’érotisme et les funérailles, si. » Pour ce qui est de la différence entre l’érotisme et la pornographie, je suis ravie de lire l’avis de l’auteur et je m’y rallie. Comme il le dit si bien : autant discuter du sexe des anges… Comte-Sponville pense ce que je ne cesse de répéter : la différence que brandissent les détracteurs de la pornographie (en dehors du porno marchand) n’est qu’esthétique, une valeur forcément subjective. Le terme pornographie revêtant une connotation péjorative, immorale, quand on admet que l’érotisme est juste amoral et positif). « La pornographie est parfois plus vraie (que de mièvrerie, bien souvent dans l'érotisme !), et toujours plus dérangeante. Le sexe ni la mort ne se peuvent exhiber sereinement. »

 

Pour ce qui est du couple, Sponville défend l’idée d’Aristote, l’amitié ne saurait être absente du couple. Le philosophe cite Rougement : « Être amoureux est un état ; aimer est un acte. » Et de poursuivre  : « Aucune passion ni aucun désir ne sauraient dispenser d'aimer celle ou celui dont on est amoureux, de se réjouir de son existence, de lui vouloir du bien, ni donc, si l'on vit avec elle ou avec lui, de devenir ou de rester son ami. »

 

Le sexe ni la mort est un ouvrage plaisant à lire. Pour ma part il ne m’a pas appris grand-chose sur le sujet, ça me laisse sur ma faim, certains passages sont redondants et l’auteur enfonce pas mal de portes ouvertes ; le discours philosophique est, quant à lui, celui que j’ai lu, écouté et étudié en cours de philo. Mais enfin, une révision est bienvenue… et c’est beaucoup plus amusant. Ce livre de savoir vivre l’amour est vivement à conseiller, le propos est alerte et la construction séduira ceux qui dormaient pendant leur cours de philo ou qui veulent rafraîchir leur conception de la vie amoureuse. Plus amoureuse que sexuelle, finalement…

 

Anne Bert

 

André Comte-Sponville, Le Sexe ni la mort, Albin Michel, janvier 2012, 350 p., 21,80 €

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