La peinture substance d'Evelyne Winocq Debeire

Voir est difficile, implique un regard attentif. Celui-ci doit répondre aux injonctions de l'intelligence secrète qu'Evelyne Winocq-Debeire développe dans son travail. Il  naît d'un désir d'unité et du besoin d'aller à l'essentiel au cœur de la pulpe et la profondeur de la peinture. Il faut donc savoir se perdre dans le feuillage et le paysage de l'œuvre, céder à l'agitation du multiple et de l'un qui l'agitent.

Evelyne Winocq-Debeire ne déroge jamais à la plus haute exigence : sa recherche dégage une énergie perceptible. Elle s'attache à maintenir un frémissement, laisse respirer l'espace et arrache l'immobilité de la peinture rendue à son essence même par des effets de strates et de gestes. Ils sont capables  de créer présence et matérialité dans un monde à la fois tranquille et intranquille. Jouent ici - même si cela n'est pas visible d'emblée - le plein et le vide, leur lente rotation en un mouvement que la profondeur aspire. Une telle œuvre est celle de la présence d'un  ineffable matériel où le flux profond des verts appelle à durer contre le ciel. Une part de chaque toile se redresse vers le jour, l'autre s'incline vers la nuit mais la lumière sourde reste en rupture contre l'ombre. Les "frondaisons" les plus basses la toisent par défi. Leur vastitude l'entoure et la déchire. Dans l'immense brassage des toiles le regard trouve non un repos mais s'autorise un moment de paix : il devient aussi (surtout) celui de la réflexion. La gravité est de mise là où pourtant couve une fraîcheur qui n'a rien de superficielle. En prenant divers "feuillages" en charge, elle donne sens au chaos.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Évelyne-Winocq Debeire au château du Pé, du 3 mai au 7 juin 2015. Château du Pé - Saint-Jean-de-Boiseau

Aucun commentaire pour ce contenu.