Sybille est une actrice à qui tout sourit : des rôles qui lui plaisent et lui valent l'amour du public, deux Césars, un compagnon aimant, des enfants adorables et surtout, l'engouement de deux producteurs pour le scénario qu'elle commence à écrire. Ceux-ci, les Ceauçescou aussi appelés les Thénardier lui font signer un contrat mirifique et les vrais ennuis commencent. Très regardants, voire intrusifs ils imposent à peu près tout, réécrivent le scénario qui initialement avait pour héroïnes trois infirmières, mettra en scène trois escorts. Pas grave, c'est ça qui plaît ! lui affirment-ils. Et Sybille n'est pas au bout de ses peines mais  s'accroche en incorrigible optimiste.  Elle  sera croit-elle, la seule à réussir avec les Thénardier là où d'autres réalisateurs se sont cassé les dents. Le dernier en date ayant fini jeté dans l'escalier.

Tyranniques, colériques, connus comme le loup blanc dans le métier, le frère et la soeur Ceauçescou finissent comme annoncé par échouer à produire le film et à éjecter tous ceux qui travaillent pour eux de façon aussi brutale que choquante laissant Sybille incrédule et sonnée bien que les signaux d'alerte venant de toutes parts n'aient pas manqué.

Sylvie Testud,  actrice, réalisatrice et romancière dépeint l'envers du décor du cinéma comme personne. Les coulisses de l'usine à rêves se dévoilent, méchantes, chaleureuses, survoltées, hystériques. On y rencontre des actrices qui ne tournent plus beaucoup,  surnommées les "affamées" ; d'autres qui ne paieraient jamais un café de leur poche...des producteurs trop pingres pour offrir un pot de fin de tournage ; des investisseurs moutonniers et frileux et des professionnels de la profession assez allumés pour faire un beau feu d'artifice permanent, toujours prêts à repartir après avoir été franchement échaudés.

Dans ce roman, l'auteur règle de façon hilarante quelques comptes avec un milieu qu'elle décrit de façon  féroce  et tendre.

Brigit Bontour

Sylvie Testud, C'est le métier qui rentre, Editions Fayard, 260p., 19 euros