Philippe Pastorino, Microntes : Le charme discret des miniatures
Philippe
Pastorino est un adepte du minimalisme en littérature. L'Âge d'Homme nous a
donné de lui, en 2001, des contes et mélanges intitulés La Fabrique des Fous. Il y renouait avec une tradition à laquelle
Félix Fénéon, Jacques Sternberg et autres Pierre Dac ou François Cavanna, voire
Grégoire Lacroix et ses Euphorismes,
ont donné ses lettres de noblesse. L'année suivante, c'était, chez le même
éditeur, Cache-Sottise, un recueil de
distiques de la plus belle eau.
Plus de deux lustres lui ont donc été nécessaires pour mûrir ces Microntes, titre qu'il faut sans doute lire comme une crase qui aurait affecté Micro-contes. Difficile de faire mieux dans le genre condensé. Il s'agit de textes qui tiennent à la fois de l'aphorisme et de l'épigramme, de la moralité et du haïku, de la fabulette et du cadavre exquis. Le tout broyé, malaxé, concocté par un auteur à l'esprit non-conformiste. Par un amoureux du nonsense. Un humoriste désabusé. Un joyeux pessimiste, un peu comme le fut en son temps Pierre Desproges.
Bref (si l'on ose écrire), ces quelques trois cents textes minuscules - gare à la crase! -, ces histoires sans queue ni tête, pourraient être nés du cerveau fécond d'un membre de l'OuLiPo. Car, contrairement à ce que l'on pourrait penser, elles obéissent à un impératif des plus rigoureux : chacune ne doit pas comporter plus de trois phrases. C'est dire le corset dans lequel s'est trouvée recluse l'imagination de Pastorino, prompte pourtant à s'évader hors des limites communément admises.
Puisqu'il paraît qu'un bon dessin vaut mieux qu'un long discours, lequel serait, en l'occurrence, particulièrement incongru, voici, à titre d'exemple, la pénultième qui porte, en bonne logique (pour une fois), le n° 299. Elle a pour titre La curiosité : "Appuyer". Clic. BOUM !".
Après l'exploration et la mise en oeuvre d'un genre littéraire qui n'a de mineur que l'apparence, l'auteur de ces délicieuses bimbeloteries devrait désormais se lancer dans l'écriture d'un roman. Roman ruisseau plutôt que roman fleuve, va sans dire. Pour le plus grand plaisir de ses lecteurs. Je lui suggère d'ores et déjà un titre : Guère épais.
Jacques Aboucaya
Philippe Pastorino, Microntes, Editions Xenia, collection "Indigo", mars 2013,
136 pages, 10 €.
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