Le pouvoir du chien : l' implacable vengeance.

Phil et George sont deux frères aussi dissemblables que possible. Le premier est l’archétype du cow boy. Sec, vif, d’une intelligence rapide et impitoyable, personne ne trouve grâce à ses yeux perçants.

Le second est plus mesuré, plus doux, moins percutant, surnommé « Gras-double » par son frère. Phil gère les milliers de bœufs, la dizaine d’employés du ranch familial. Il collectionne les pointes de flèches des indiens disparus de la région, en fabrique de fausses à l’occasion, castre 1500 veaux à main nue en une semaine. George lui est à la manœuvre pour les comptes du domaine, les tractations avec les marchands de bestiaux. Tous les deux possèdent le ranch Burbank, le plus grand de la région depuis que leurs parents sont partis prendre leur retraite dans un hôtel de Salt Lake City.

A quarante ans, ils dorment toujours tous les deux dans la même chambre et leur vie sans affect ni ami se déroule au rythme des saisons du grand ouest, dans des paysages à couper le souffle.

En 1925, les indiens sont dans des réserves, l’électricité est arrivée au ranch mais l’existence  semble s’être arrêtée au temps des pionniers.

Jusqu’au jour ou l’impensable se produit : George tombe amoureux et épouse  Rose, la jeune veuve du médecin de la ville que Phil par pure méchanceté avait poussé au suicide quelque temps auparavant. L’hostilité larvée entre les deux frères fait place à une guerre de position. Phil se jure de se débarrasser de l’intruse. D’une grossièreté sans limite, il ne lui adresse pas la parole et fait de sa vie un enfer. L’arrivée de Peter, le fils de Rose, un étudiant en médecine encore plus glacial et manichéen que Phil va révéler les failles de ce dernier et provoquer un dénouement  impitoyable.

Dans ce roman déjà publié en 1967, Thomas Savage, lui-même élevé dans un ranch du Montana  dresse le portrait d’un homme de l’ouest trop austère pour ne pas être équivoque : Phil un homme brillant qui a réussi ses études à l’université ne se lie avec personne de peur d’être touché et déçu : «  il avait détesté le monde par crainte que le monde ne le déteste le premier ». Et cette terreur le conduit à la solitude la plus complète que seul le jeune Peter fera mine de rompre pour mieux le briser.

L’auteur aborde ainsi un des tabous absolus du grand ouest, l’homosexualité. Car Phil sous ses abords de macho est un homosexuel refoulé qui n’a vécu qu’une seule grande histoire d’amour vingt ans plus tôt et retrouve à ses dépends le même sentiment auprès de Peter.

 

Le pouvoir du chien

Thomas Savage, traduit par Pierre Furlan.

Editions Belfond, 15 euros.

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