Virginie Despentes, Vernon Subutex : un panorama stupéfiant de la France en 2015
Vernon Subutex est un ancien disquaire qui après avoir perdu son magasin se voit expulsé de son appartement. Alex Bleach, un ami qui le dépannait financièrement de temps à autre vient de mourir d’overdose. Impécunieux mais ne se voyant pas finir tout de suite à la rue, il appelle tour à tour d’anciennes relations susceptibles de l’héberger une nuit ou plus.
Commence alors un défilé de personnages surgis du passé, s’adaptant difficilement au présent. Si tous se sont côtoyés vingt ou trente ans plus tôt dans la communion du rock, la fougue de la jeunesse aucun n’accepte une époque où la peur de l’autre, de la précarité, de l’islam sert de fil rouge.
Comme dans une enquête policière, un certain nombre de gens cherchent à le retrouver parce qu’il se retrouve détenteur d’enregistrements devenus posthumes de Bleach alors que lui même est juste en quête d’un endroit où dormir le soir.
Il y a Xavier, »le connard de droite », scénariste, qui a surtout épousé une femme riche, ce qui lui permet de vivre bien au dessus de ses moyens ; Daniel, une femme devenue homme ; Pam, une ancienne actrice porno ; Lydia Bazooka, une journaliste amoureuse d’Alex Bleach ; Gaëlle une jeune femme qui vit dans l’appartement de 300 mètres carrés d’un trader azimuté ; Aïcha, la fille voilée d’une actrice X, Vodka Satana ; Sylvie, l’ex petite amie d’Alex qui tombe amoureuse de Vernon ; Laurent Dopalet, le producteur pour qui : « le pire est le succès des autres ». Ou encore la hyène, un troll à la méchanceté légendaire parfaitement en phase avec la société actuelle.
Autant de rencontres, de styles de vie différents, parfois d’hébergements de fortune dans lesquels Vernon Subutex ne se retrouve pas. Son existence lui échappe et doucement, fatalement, il glisse vers l’exclusion.
Qu’est ce qui a dérapé ? le déclin puis la disparition du vinyle ? Oui, mais pas seulement. Le temps qui passe ? Oui, mais il y a autre chose. La mort des copains par cancer ou overdose est évidemment insupportable. Celle de Joe Strummer, sur scène à 50 ans, une vraie faute de goût.
Sa génération ne se reconnaît pas dans ces années Facebook. Les personnages se cognent à la brutalité d’une époque vide et grossière. Douce avec les forts, les riches, impitoyable avec ceux qui ont été et ne s’adaptent pas à la violence des rapports humains.
Se glissant dans la peau de chacun de ses héros, Virginie Despentes livre un panorama stupéfiant de la France en 2015. Décrivant avec autant de bonheur la bourgeoisie fanée que le milieu des affaires, du cinéma ou de ceux qui vivent dehors avec leur chien comme seul réconfort. Son écriture toujours aussi vive et puissante semble avoir gagné en empathie avec les années tout en gardant la fougue de ses premiers romans. On attend avec impatience le tome II.
Brigit Bontour
Virginie Despentes, Vernon Subutex 1, Grasset, janvier 2015, 400 pages, 19,90 €
> Lire un extrait de Vernon Subutex de Virginie Despentes
2 commentaires
un livre alire.sur
C'est un excellent livre, mais cette critique est atroce : ce n'est certainement pas un panorama de "la France", mais bien plus une galerie de personnages du show-biz parisien. Il faut traverser le périph' parfois...