Côme Martin-Karl, "Les Occupations"

Pierre est le dernier rejeton d’une famille dont la devise est de ne pas s’extraire de la médiocrité, de ne pas vivre pour ne rien risquer. Chacun doit vivre sur l'acquis de vacuité gagné au fil d'une vie à tenter surtout de ne jamais rien faire de remarquable, à quelque degré que ce soit. Mais Pierre va faire sa révolution sociologique, culturelle et sexuelle !

 

« Au cinéma, et souvent aussi en littérature, il faut une motivation aux personnages, un but, quelque chose à atteindre ou à fuir. Si Pierre était un personnage, c’est ce grand-père maternel, Marcel, le petit employé de l’ambassade, le censeur modique, pleutre et indulgent avec lui-même, qui serait à l’origine de ce désir de ne pas aller trop haut pour ne pas tomber trop bas »

 

Le grand-père Marcel est la figure honteuse de la famille, parce qu’ancien collabo ! mais sa seule action était d’être un amateur de théâtre à qui l’on avait confié la tâche de vérifier si les pièces proposées à la censure n’étaient pas subversifs. Et nimbé d’une manière d’autorité supérieure, il exerça sa passion avec un zèle tout enflé de sa propre autorité. Rien de terrible, à tout le moins rien d'aussi infamant que l'autre grand-père, le héros, qui fit du marché noir et s'enrichit sur le dos des nécessiteux, mais sut s'enrôler au bon moment et se nimber d'une gloire surfaite mais belle à exhiber... 


C'est avec le poids de ce grand-père honteux sur les épaules que Pierre va vivre ses expériences de jeune homme, et s'enfoncer d'autant plus profondément dans la liberté qu'il aura été contenu par son héritage.


Un roman attachant, drôle et fin, dont l'intelligence est de laisser sourdre la morale sous les aventures d'un personnage somme toute très simple et banal, et qui porte sur lui toutes les souffrances d'une Occupation dont les Salauds ne sont pas toujours ceux que l'on croit.

 

Loïc Di Stefano

 

Côme Martin-Karl, Les Occupations, JC Lattès, janvier 2013, 208 pages, 15 euros


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