Empty, ou l’art du rien
Profitant du postulat de départ pour changer les repères et
pousser le curseur encore plus loin, N’Dongo enferme quatre personnages dans un
loft, au vingt-deuxième étage d’une ville moderne occidentale, et les livre à
leurs funestes instincts.
Sasha Ganz, hautaine et persifleuse, reçoit ses hôtes, la veille de l’inauguration de la grande rétrospective qui doit la consacrer : Omar Wade, jeune poète prétentieux, joue au pédant en faignant de croire que citer et se diminuer lui confère une certaine (fausse) modestie ; Christina Finck, critique d’art névrosée en mal de reconnaissance n’oublie jamais de soigner la chute en assortissant ses compliments au fil de l’eau et surtout Lars Ekman, son ex-partenaire mais surtout ex-mari, qui ne tarde pas à pontifier tant sa frustration l’étouffe.
En vingt scènes comme autant de coups de revolver, les dés sont jetés, rebattus et affichés sur le grand tableau noir de la lucidité intronisée au cœur du perfide royaume de l’art contemporain démasqué… Tartuffe déambulant chez Jeff Koons n’aurait fait mieux, le rideau de scène s’enflamme de ces contraires qui s’attirent et tendent, finalement, vers le même but : être là où cela se passe. Quelle que soit la vacuité offerte en guise de sésame.
Mais figurer sur la liste, au cœur même de toutes les attentions, a un prix. Bien trop élevé.
Plus dure sera la chute… dans le vide.
François Xavier
Mamadou Mahmoud N’Dongo, Empty, La Cheminante, octobre 2014, coll. "Harlem Renaissance", 120 p. – 16,00 €
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