Marie-Laure Dagoit : Bagatelle pour un massage

Ouvert au trouble, le ventre de l’homme ouvert au ciel  la question est moins : d'où vient ce qui s'écrit ? que la suivante : que fait le fait d'écrire  libère et fasse jouir ? Soudain  le fruit rose du mâle s’offre sur son bosquet à des rus dont l’encre de l’écriture varie l’essence en fonction des sentiments qui animent l’amoureuse lorsque son visage de porcelaine s’approche du fruit. Il se  déguste ici dans un présent  par contumace. Le texte de Marie-Laure Dagoit  fait masse et nasse pour l’objet des désirs et son « intranquillité » notoire. On est loin de la  queue de cochon à visser dans un carnaval infernal. Tout cela tient autant d’un relevage du fantasme que de bagatelle pour un massage. Et bis repetita suivant les desiderata. Le fruit de l’entraille devient un légume va savoir ! Le tout pour les Ave Maria  des  hormones du mâle et leur coulis d’organe. Il y a de quoi évacuer le spleen dans de beaux draps. Ainsi avance l’histoire dans le mildiou des marges. En sobre évocatrice l’auteure extirpe du vrac le menhir granitique. Elle la rappelle mais tout autant s’en défait, s’en dépatouille sur le papier. L’objet du désir y est nu et peu crispé. Est soulagé le pesant de la quotidienneté. Preuve que les mots font ce que l’image ne peut exprimer  à savoir une compassion pour l’homme et  le peu qu’il est. Rien n'a lieu qu'au lieu de la langue. En ce lieu, suspendu au bord de la parole, l'oiseau verbal (sexuel, volatil) parodie l'homme qui parodie l'oiseau (instinct de ciel). Merle moqueuse, pie voleuse  l’auteure propose une aria à volubilité trans-animale et trans-humaine, un passage entre les définitions, une suggestion d'infini portative et discrète. La langue incarne un coup de dé mesuré. Il abolit pour un temps le hasard sous fond de ZZtop (ou pas). Il décolle  de là  et vole, hissant sa vie hors de la nuit au nom de l’amour qu’une femme lui porte et qu’il ne mérite pas (forcément).


Jean-Paul Gavard-Perret


Marie-Laure Dagoit, J’étais ta reine, Editions de la Salle de Bains, Rouen, 2014.


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