"Que ta volonté soit faite", Maxime Chattam

Est-ce parce qu'il entrecoupe son récit de réflexions sur le roman, l'écriture, la lecture, le style, que le dernier roman de Maxime Chattam, Que ta volonté soit faite, est paru en "blanche" plutôt qu'en "noire" comme ces précédents thrillers ? Quoiqu'il en soit, ce n'est pas son aspect littéraire qui étonnera, ni le style, ni l'abondance des horreurs issues des profondeurs de la nature humaine. Rien n'étonnera les lecteurs de Chattam, qui le retrouveront tel qu'en lui-même, inventif et maladroit. Inventif, parce qu'il n'a pas son pareil pour poser une situation et y enfoncer son lecteur avec la plus grande jouissance. Maladroit, parce qu'il écrit mal, il y a un souffle, un rythme, de belles trouvailles d'image, mais des lourdeurs et des répétitions indigestes à qui s'intéresse à la phrase et pas uniquement au rythme. 

Chattam se délecte du mal. Ici, son incarnation est Jon Petersen, né dans le sang et la mort, et dont la jeunesse va se passer entre la rudesse d'une éducation loin de tout, sans ami, sans autre plaisir que de laisser monter profondément en soi la crise dont la finalité est la jouissance de détruire des fourmilières, de sentir monter cette pression et de la lâcher sur d'innocentes victimes. Le décor de la petite bourgade figée dans le temps, au fin fond du Middle West, Carson Mills que Maxime Chattam dépeint avec beaucoup de réussite, pour en faire un des personnages centraux de l'intrigue, et le parfait paysage où pourra s'épanouir la puissance maléfique de Jon. Les exactions dont il va se rendre coupable dépassent l'entendement, et crée même un certain haut-le-coeur, mais les lecteurs de Chattam en ont l'habitude maintenant. Comment est né le Mal en Jon, et comment il va se répandre... 

Que ta volonté soit faite, qui ne brille pas par l'originalité de l'intrigue mais par un retournement final assez intelligent et surprenant, est à lire comme un hommage au roman noir, qui dissèque l'Amérique profonde, puritaine, confite dans son image d'Epinal avec aussi bien les paysans que le shérif comme on les image... hommage aussi à Stephen King, dont on sent bien qu'il est le vrai modèle de ce roman. Et Chattam n'est pas loin d'égaler son maître.


Loïc Di Stefano

Maxime Chattam, Que ta volonté soit faite, Albin Michel, janvier 2015, 21,90 eur



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