Les peintures de Chantilly

Militaire, homme politique, bon écrivain et surtout collectionneur passionné par les œuvres d’art, le nom du duc d’Aumale (1822-1897) est attaché à celui de Chantilly. Depuis le Moyen-âge, plusieurs familles illustres ont possédé ce domaine, en particulier les Orgemont, les Montmorency, les Condé. Des personnages et des créateurs non moins célèbres, auteurs, peintres, ecclésiastiques, architectes et jardiniers ont travaillé à Chantilly, ont assisté aux fêtes, ont restauré le château, ont d’une manière ou d’une autre participé à son rayonnement : La Fontaine, Bossuet, La Bruyère, Madame de Sévigné, Jean-Baptiste Oudry, Jules Hardouin-Mansart, Le Nôtre, parmi tant d’autres. Ce site que tous veulent rendre enchanteur durant le Grand Siècle sert un temps de prison lors de la Révolution, période au cours de laquelle le grand château est détruit et le parc dévasté. Les Orléans le reprennent et le duc d’Aumale, qui s’est exilé entre 1848 à 1870 en Angleterre, réintègre les collections qui avaient été saisies et installées au Louvre. Il lègue en 1886 le domaine à l’Institut de France à qui revient la gestion en lien avec une fondation créée en 2005 par l’Aga Khan.

 

Ouvert l’année suivant la mort du duc d’Aumale, le musée Condé est avec le Louvre à mettre au premier rang des musées de France. L’étendue et la richesse de leurs collections les rapprochent mais les comparaisons n’auraient guère de sens car leurs contenus en termes d’artistes, de périodes, de fonds (par exemple miniatures et photographies bien représentées à Chantilly ; antiquités égyptiennes et grecques au Louvre, etc) divergent. De plus, chacun comptent des œuvres extraordinaires et absolument uniques, Chantilly possédant un vaste ensemble de meubles et un splendide Cabinet des livres abritant entre autres volumes précieux Les Très Riches Heures du duc de Berry, trésor s’il en est, alors que le Louvre accueille parmi ses nombreux joyaux, celles que l’on appelle parfois « les trois grandes dames du musée : la Vénus de Milo, la Victoire de Samothrace et La Joconde ».

 

Il n’est question que de peinture dans cet ouvrage. Les deux auteurs dialoguent autour d’une petite centaine d’œuvres diversement exécutées - huiles, aquarelles, sanguines, détrempes, plume et encre - signées par les artistes les plus fameux, Raphaël, Botticelli, Léonard de Vinci, Ingres, Véronèse, Watteau, Poussin, Delacroix…et quelques oubliés qui sont également intéressants à voir ou revoir, Dosso Dossi, Lancret, Lubin Baugin, Subleyras…De page en page, il s’établit comme un écho entre émotion et savoir, descriptions admiratives et données historiques résultant du double regard porté sur chaque œuvre, celui de l’amateur, celui du spécialiste. Dialogue complice à deux niveaux de lecture. Ainsi les commentaires se complètent, se croisent et invitent le lecteur à formuler les siens ou à chercher plus loin d’autres informations. Les textes sont courts, simples, ni pédants ni savants, suffisent à introduire les tableaux choisis.

 

Dominique Vergnon

 

Stéphane Bern, Edwart Vignot, Le musée Condé de Chantilly, l’art de collectionner, Editions Place des Victoires, 208 pages, 100 illustrations, 29x29 cm, décembre 2014, 29,95 euros.

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