Adressées à Camille

De La Valse à L’Abandon ! Deux pièces qui pourraient enclore l’existence de Camille Claudel. Entre elles, cette autre sculpture de 1905, L’Implorante. Un jalon majeur dans son parcours d’artiste et de femme. Paul trouvait que cet admirable élan de bronze représentait le destin de sa sœur. Du bonheur au malheur, de l’amour libre à l’enfermement de l’esprit, le génie personnel de Camille s’exprime dans chacune de ses œuvres, entier, unique, né d’elle-même. Rodin estimait que s’il lui avait montré où trouver de l’or, celui qu’elle avait trouvé en elle lui appartenait à elle seule, inaliénable. La passion en avait été la source.

 

On comprend qu’elle puisse inspirer des lettres qui sont autant d’hommages à sa puissance créatrice, à sa féminité, à son désir d’union totale, à ses besoins de rupture définitive. Dix-huit auteurs s’offrent le droit de lui écrire et de partager dans ce livre leurs textes avec le lecteur en qui le nom de l’artiste résonne. Elle se détache de ligne en ligne, tel un filigrane qui donne de la valeur au papier. A chaque page, à la fois elle s’impose avec force et reste comme en retrait de ces déclarations. Ils sont libraire-éditeur, cinéaste, plasticienne, directrice-artistique, architecte, psychanalyste, musicien. Autant de regards sur l’œuvre et la personne. Tous ont en commun une identique ferveur, ont reçu au cœur son influence, lui dédient une image, un dessin, une création inédite, tous lui envoient leurs mots pour lui prouver  par-delà le temps qui sépare et l’espace qui éloigne qu’elle est « chère » pour eux. Des correspondances où se lisent l’affection ressentie, l’admiration éprouvée, l’émotion perçue. Des textes forcément divers, entre réserve et expansion, d’intérêt inégal, de style original ou plus banal, avec des illustrations de qualité irrégulière, mais toujours entraînés par la sincérité d’un amour, d’une tendresse, d’une reconnaissance envers celle dont la vie, comme le dit Reine-Marie Paris, petite nièce de Camille Claudel (1864-1943) qui signe parmi les autres, une lettre poignante, « a été un roman, une épopée ». Des lettres qui n’auront jamais de réponses, ou plutôt si, qui en ont eu une magnifique, celle de son héritage qui est sa présence en eux et le souffle inspirateur de leur propre art. Rappelons que prochainement, à la rentrée 2016, le premier musée consacré à Camille Claudel verra le jour à Nogent-sur-Seine.

 

Dominique Vergnon

 

Sous la direction de Sylvie Andreu, Chère Camille…18 lettres à Camille Claudel, Bernard Chauveau Edition, 60 pages, 20 illustrations, 20x25 cm, bilingue anglais, juin 2106, 28 euros.    

 

 

 

 

 

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