Fanny Begoin : instant d’années


Le temps n’est rien, l’instant est tout. Fanny Begoin en prend grand soin pour que jaillisse sa pulpe érotique. Avant, après ou pendant la tendresse. La photographe réinvente des heures nues, rameute la chaleur de l’attente. L’angoisse s’y dissout entre des mains tendues, des corps offerts, recroquevillés, embrassés. Parfois presque si inséparables qu'ils versent dans l'improbable. Ils ne luttent plus contre l'ombre : ils se fondent en elle puis remontent à la clarté où l'artiste les saisit.



Flottement, souffle de cendres. L'instant redevient lieu qui  lui-même retourne à l'invisible. S'impose le pouvoir d'étrangeté d'un infini presque tactile. C'est là qu'il monte, qu'il déborde face au danger du temps qui court à notre perte. En bougeant il nous pétrifie. C'est l'idole dont ne se saisit que le creux. C'est pourquoi Fanny Begoin préfère l'instantané et son imaginaire sans appel. On en naît, on y retourne. Nous sommes ses anachronismes et sa pensée.  Face à la  comédie humaine qui prouve le temps la créatrice nous en extrait pour en donner la figure impérissable du moment; Il fait notre jour, notre nuit et nous éloigne du romantisme de la ruine.  Cela évite d'entrer la nostalgie en tant que compte à rebours.


Jean-Paul Gavard-Perret

 

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