"Or noir", le scalpel de Manotti

Une auteur(e) engagée

 

Dominique Manotti a attiré l’attention par son écriture incisive et aussi très « politique », que cela soit avec Lorraine Connection, Nos fantastiques années fric (adapté au cinéma par Eric Valette) ou encore L’honorable société co-écrit avec DOA. Avec Or noir, nous avons affaire ici à une enquête du jeune commissaire Daquin, personnage fétiche de Dominique Manotti qu’on retrouve dans Sombre sentier et Kop !, dans la Marseille des années 70. Manotti, c’est avant tout un style incisif et engagé : à nous de voir ici si ça paie…

 

Après la French connection

 

Daquin, jeune commissaire, se voit affecté à Marseille en 1973. Il se retrouve à enquêter sur l’assassinat de Maxime Pieri, notable marseillais, intéressé à l’import export. Le seul témoin du meurtre est Emily Frilckx, épouse d’un riche magnat sud africain des matières premières. Daquin comprend vite qu’il doit marcher sur des œufs : l’enquête navigue en eaux troubles, entre SAC et Milieu où les anciens de l’organisation de Gaetan Zampa pullulent. Mais il n’y a pas que des français qui sont mêlés : iraniens, israéliens et américains sont plongés jusqu’au cou d’un trafic de pétrole qui commence à exploser au moment où l’OPEP menace d’augmenter les prix. Daquin avance cependant dans son enquête, quitte à y laisser des plumes.

 

1973, le tournant

 

Or noir se situe à Marseille, après la French connection (et on ne peut s’empêcher de penser aux films de Friedkin et Frankenheimer) ; sans problèmes, le roman pourrait s’appeler « Pétrole connection », tant la passion du pétrole anime les trafiquants évoqués dans le livre. De plus, le lien établi par l’auteur entre l’expansion du trafic de pétrole (dans  un contexte de rareté)  et la croissance du marché de l’art contemporain (ou comment réinvestir des dollars dont on ne sait quoi faire à l’attention des nuls) frappe l’imagination du lecteur peu amateur de ce type d’œuvres… Avec Or noir, roman noir historique, Manotti excelle à décrire une ambiance de  corruption généralisée et interroge notre modernité : le pétrole est un marécage (parfois sanglant ?) dans lequel américains et saoudiens (entre autres) règnent en maîtres manipulateurs. A lire, à dévorer : Manotti est un(e) véritable écrivain(e).

 

Sylvain Bonnet

 

Dominique Manotti, Or noir, Gallimard Série noire, mars 2015, 333 pages, 17,50 €

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