Max Beerbohm, "Zuleika Dobson" : osez une autre littérature !

Cette curieuse publication mérite le détoure. D’abord pour le travail remarquable de mise en page. De façonnage. D’impression. Donc d’édition. Voilà un éditeur qui vous renseigne sur le poids du papier de couverture - du Trucard o felt de 280 gr. Vous saviez qu’il affichait une épaisseur de 450 microns ? Et que sa rugosité (Bendtsen) était de 900 ml/min ? Quand vous l’aurez en mains, vous comprendrez. Ce souci du détail fait toute la différence. Surtout pour un roman anglais illustré. Les polices sont au diapason. Et si cet ouvrage compte 12 veuves et 14 orphelines, n’en faîtes pas le reproche à Zuleika Dobson !


Quant au prix, un tel "pavé" pour moins de 25 euros c’est cadeau ! L’éditeur présente d’ailleurs ses excuses en quatrième de couv. car, "
à ce prix-là, [il aurait] bien voulu vous offrir l’amour, mais l’imprimeur n’en avait plus."
Vous l’aurez compris, ces toulousains de Louverture sont des fous furieux. Et ce n’est pas l’entretien que leur directeur nous accorda qui dira le contraire. Au petit détail près que, d’amour, il en faut énormément pour conduire une telle aventure et oser encore publier de telle perle...


 en 1872, "l’incomparable Max", comme l’avait surnommé George Bernard Shaw n’aura commis qu’un seul roman. Mais quel feu d’artifice(s). Victorien mais point trop, Max usait surtout de la caricature. Il publia aussi des essais fort cinglants. Comme s’il avait voulu se distraire, il croqua la vie d’Oxford. Et nous délivra une rafraîchissante épopée amoureuse. 

Une jeune et séduisante prestidigitatrice débarque avec armes et bagages. Elle vient voir son grand-père de recteur. Les étudiants tombent comme des mouches. L’étiquette se froisse. Les cœurs chavirent. Mais le Duc n’en a cure. Tout le moins en apparence.
Et la belle Zuleika fond de se voir ainsi dénigrée. Elle s’entiche alors dudit. Faux pas ? Volonté de se caser ? Et pendant ce temps les étudiants sombrent. Au propre comme au figuré. Quand on aime on ne compte pas. Les limites sont franchies. La vie des uns se brisent en mille éclats. Les espoirs des autres s’évaporent comme les rides des rames sur la Tamise...
Quelle fin possible pour ce petit chef-d’œuvre ? Vous le saurez en savourant chaque page. Osez une autre littérature ! Embarquez-vous dans les délires d’un maître du cocasse qui croque les sybarites comme une pomme tout juste cueillie.


Annabelle Hautecontre


Max Beerbohm, Zuleika Dobson, traduit de l’anglais par Philippe Néel et entièrement révisé par Anne-Sylvie Homassel, illustré par George Him, Monsieur Toussaint Louverture, mai 2010, 352 p. - 16,75 €    

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