Cette année Claude Simon aurait eu 100 ans

 

Claude Simon,  « Œuvres , tome II,  édition d'Alastair B. Duncan, collection Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, Paris, 2013, 1712 pages, 66,50 E..

 

En dépit de son Nobel, Claude Simon demeure plus ou moins occulté mais majeur.  Entre le massif, le compact de ses puzzles il a lutté contre tous ceux qui se bercent de l'illusion expressive d’un aveu linéaire du secret comme s'il suffisait d’une méthode aussi simpliste pour rendre compte du monstre. Il ouvrit la voie à une expérience de la fiction dont les évènements autobiographiques et familiaux ne sont que le prétexte.

 

Pour Simon la monstration du secret ne peut passer par la loi traditionnelle de l'aveu biographique. Ses romans développent une langue parallèle. Arraché à sa narrativité classique le romanesque est détourné du lit de son fleuve tranquille. Il fait le jeu d'une autre proximité plus intéressante. Le « Tome II » des œuvres permet de comprendre ce travail de disjonction fait de fragmentations, dispersions, incisions, coupures. La poétique de l'imaginaire prend chez Simon l'approche ou le prolongement d'un livre entrevu qui répondrait  par explorations de nouvelles données et tente de répondre au "sommes-nous" de Jabès et  au "si je suis" de Beckett.

 

Dans cette stratégie, l'auteur pulvérise les voies de la prétendue transparence narrative. Chaque « histoire » fait émerger certaines pièces qui font partie de la vie mais qui ne peuvent l'englober en sa totalité. Elle laisse apparaître des doutes voire des confusions et des absences. Tout semble y apparaître. Tout "sauf le secret" écrit Claude Simon. Et l’auteur d’ajouter : « face à une idéalisation très influencé par la rêverie, il n'existe pas un peuplement par les aveux mais par la splendide limpidité du Rien". Chez le romancier, sous ce « Rien »,  quelque chose remue. Le montage des romans le fait vibrer. A lire ou relire absolument.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

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