"Méfiez-vous des enfants sages" - roman de Cécile Coulon

MEFIEZ-VOUS DES ENFANTS SAGESÀ vingt ans à peine, Cécile Coulon n’en est pas à son coup d’essai avec Méfiez-vous des enfants sages. À dix sept ans, elle publie son premier roman, Le voleur de vie (inspiré de l’Education sentimentale de Flaubert) puis un recueil de nouvelles, Sauvages. Outre Steinbeck, Maupin, Bret Easton Ellis, Proust, elle est passionnée de cinéma (Pasolini, La Nuit du chasseur, The Big Lebowski, L'Année dernière à Marienbad, etc ...) et de musique (Elvis Presley, Jerry Lee Lewis, Chuck Berry, The Ramones). C’est d’ailleurs aux Etats-Unis, lieu de tous les possibles, que se déroule le récit de Méfiez-vous des enfants sages.

C’est dans une petite ville du sud des Etats-Unis « où les filles étaient mères avant de passer leur permis de conduire » que grandissent et évoluent les enfants sages de Cécile Coulon. Trois personnages qui voient leur vie défilée sous le regard de la jeune Lua qui déteste le chocolat noir. Chacun a renoncé à ses rêves pour se contenter d’une vie sage aux rouages bien huilés. Chacun à leur manière, ils vont finir par s’en émanciper. Lua les observe et refuse d’être une enfant sage et de sombrer dans l’ennui. Mais dans un tel contexte, c’est loin d’être une chose facile. On ne sait ce qu’elle devient à la fin du roman : un soir, dans la cuisine, elle a la sensation que tout est fini. Libre au lecteur d’imaginer la suite : devient-elle comme ses parents ? Décide-t-elle de mettre fin à ses jours pour ne pas devenir une enfant sage ou bien de fuguer de cette ville ? Tout est possible.

Méfiez-vous des enfants sages a une bande son, la liste des morceaux à écouter en lisant (1), ce qui permet d'entrer dans l'ambiance, le mood, de l'auteur. Mais la liste en en fin d'ouvrage, placée en vis-à-vis de chaque chapitre, elle eût été peut-être plus immédiatement accessible.

L’ensemble du roman de Cécile Coulon peut sembler manquer de cohérence dans un premier temps : la première partie est consacrée à la description de personnages qui ne sont pas clairement définis. Il nous faut attendre la deuxième partie pour les identifier comme les parents de Lua. La deuxième et troisième partie ont pour narratrice Lua. Elle y relate tous les événements qui l’ont conduite à ne pas être une enfant sage comme ses parents. L’histoire saute du coq à l’âne d’un chapitre à l’autre, les descriptions sont parfois déconcertantes et il faut avouer que le fil narratif n’est pas toujours simple à suivre.

Pris indépendamment, aucun de ces éléments n’incite à la lecture du roman de Cécile Coulon. Pourtant, réunis, ils permettent de recréer l’ambiance pesante d’une petite ville du fin fond des Etats-Unis et traduisent de façon subtile les névroses des personnages et le parcours d’une adolescente. Cécile Coulon sait écrire et imposer son propre rythme, ses propres soubresauts et conduire le lecteur où elle l'entend, même si Méfiez-vous des enfants sages souffre sans doute d'un défaut de conception ou du moins d'une ardiesse archtecturale (voire une volonté de confusion) pour pourra dérouter.


Julie Lecanu

(1) Ce qui est d'ailleurs devenu comme une habitude pour beaucoup d'auteurs, notamment de polars (Maxime Chattam, Patrick Bauwen, Phillippe Le Roy, etc.), qui donnent la bande son de leur roman. 


Cécile Coulon ,  Méfiez-vous des enfants sages, Viviane Hamy, août 2010, 112 pages, 16 €

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