" Une affaire conjugale" d'Eliette Abécassis - Ils vécurent heureux et divorcèrent.

UNE AFFAIRE CONJUGALEEliette Abécassis, normalienne, agrégée de philosophie, alterne textes intimistes comme Un heureux événement, thrillers avec la trilogie du Qumran ou encore des essais surprenants comme Petite métaphysique du meurtre où elle s’est intéressée aux origines philosophiques de l’homicide. Avec une Affaire conjugale, elle nous plonge dans l’enfer du divorce.

Ils vécurent heureux et divorcèrent… ou l’inverse.

Agathe Portal avait tout pour être heureuse : un mari, Jérôme, avec qui elle est mariée depuis huit ans, un bel appartement, des jumeaux… Tout ou presque. Elle voit son univers s’écrouler le jour où elle découvre grâce à un pocket call que son mari, non seulement ne l’aime plus, mais pire, la méprise. Elle décide alors de fouiller le bureau de ce dernier et découvre une facette insoupçonnée de son mari. Ou plutôt elle ouvre les yeux sur celui qu’elle a épousé. Une seule solution s’impose à elle : le divorce.

Les étapes du divorce se succèdent : le rendez-vous chez l’avocate, l’annonce aux enfants, la bataille pour leur garde, le partage des biens, la fange qu’il faut remuer pour anéantir l’autre et surtout la remise en cause de son monde et de ses idéaux. Tout au long de son parcours, elle cherche à comprendre comment elle a pu se tromper sur l’homme qu’elle a épousé. Une affaire conjugale qu’elle décortique en long, en large et en travers pour essayer d’y trouver un sens.

Car on ne connaît bien un homme que dans le divorce

La quatrième de couverture annonce la couleur : pour bien faire, il faudrait commencer par divorcer. En effet, comme le constate notre héroïne, c’est dans le divorce que l’homme se révèle. Le désamour, les doutes mènent à fouiller la vie de l’autre qui passe du statut de grand amour à celui de pire ennemi. C’est donc au moment du divorce qu’Agathe découvre vraiment son mari et ce dont il est capable. Elle doit également faire face à la perte de ses idéaux et faire une croix sur l’image qu’elle avait du mariage. Pire, elle culpabilise d’être à l’origine de la demande de divorce alors que son mari rentre dans la catégorie des pervers narcissiques. Comment a-t-elle pu se tromper à ce point ? Qu’a-t-elle fait de travers ?

Une fois la décision prise, c’est une véritable machine de guerre qui se met en route où tous les coups sont permis. A L’ère technologique, Facebook, internet, les portables permettent un espionnage intensif de l’autre mettant en danger ce qui assurait la pérennité de l’amour : le mensonge. Au-delà des conséquences psychologiques du divorce, Agathe en découvre également les conséquences financières. Elle devient une PME à elle seule employant avocate, détective, notaire, expert-comptable, coach, psychiatre... En résumé, le divorce est une épreuve dont il est difficile de sortir indemne et au terme de laquelle elle se demande si elle sera capable d’aimer à nouveau.

Eliette Abécassis autopsie le divorce du point de vue d’une femme. Aussi on ne s’étonnera pas de l’image parfois caricaturale donnée à l’homme. On hésite sur la conclusion à donner à ce roman. Comme l’a dit Oscar Wilde, l’amour rend aveugle, le mariage rend la vue. Ce dernier nous est souvent vendu comme la clé du bonheur et l’aboutissement du couple. C’est pour cela qu’Agathe hésite longuement à divorcer devant l’incompréhension de sa famille ou encore de sa meilleure amie qui est pourtant passée par la case divorce. Paradoxalement, en révélant les déchirements du divorce, Une affaire conjugale résonne presque comme un plaidoyer anti-divorce. Si elle aborde un sujet de société devenu banal, elle montre toute la souffrance et les ravages du divorce.


Julie Lecanu


Eliette Abécassis, Une affaire conjugale, Albin Michel, août 2010, 336 pages, 20 €

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