"Hellraiser", Fais-moi mal, fais-moi jouir!

Un auteur culte


Avec le film Hellraiser (1987), Clive Barker s’est imposé dans les années 80 comme un maître du genre. Le film a connu plusieurs suites et les personnages des cénobites, créatures maléfiques avides de plaisirs masochistes et extrêmes, sont devenues cultes. Ce que l’on sait moins quand on est un néophyte, c’est que Clive Barker avait en fait adapté un de ses propres livres. Et voici que folio SF publie la version poche de l’édition proposée par les éditions Bragelonne en 2006 et traduite par un auteur français de talent, Mélanie Fazi. Alors la question est simple : sur quoi a reposé le succès du film et du livre ?


Le plaisir coupable


Frank Cotton, le monstre du bouquin, a tout essayé au niveau des plaisirs physiques « normaux ». Il recherche désormais des sensations  extrêmes pour se sentir « vivant ». Quand il entre en possession de la petite boîte qui permet d’appeler les fameux cénobites, tout s’enchaîne. Sa belle-sœur, Julia, est une femme frustrée, affublée d’un mari falot, Rory, loin mais très loin de l’excitant et malfaisant Frank. Quand ce dernier se manifeste, créature inhumaine à moitié effacée dans le grenier, elle craque : elle veut tout simplement coucher à nouveau avec lui, pour fuir l’ennui. Elle est prête à tout, y compris à tuer.


Sexe et horreur, couple infernal


Rapide, court, efficace, Hellraiser repose sur une alchimie mêlant  sexe et horreur… ou comment faire du neuf avec de vieilles ficelles ? Car il y a rien de nouveau dans cette alchimie, à part que Barker radicalise le propos du genre, effet de la révolution sexuelle. Et il dit les choses crument. C’est la vacuité sexuelle de sa vie qui fait basculer Julia dans la folie et le meurtre. Quant à Frank, homme devenu monstre qui veut redevenir humain, c’est sa soif de plaisir – mêlé à la douleur – qui le mène à sa perte. Tout cela fait du roman un concentré de tout ce qu’il y a de plus réactionnaire dans le genre. Au point que cela en devient lassant.


On comprend cependant qu’Hellraiser puisse plaire à un public adolescent, à la recherche d’ambiances gothiques sur fond de musique métal. Talentueux et adroit, Barker a instillé dans ce petit livre l’excitation du sexe et l’ivresse de la terreur. Peut-être trop si on se rappelle des films de Jacques Tourneur où, avec une économie de moyens, la peur s’installe et demeure plus longtemps, insidieuse… vaste débat !


Sylvain Bonnet


Clive Barker, Hellraiser, traduit de l’anglais par Mélanie Fazi, Gallimard folio SF, avril 2013, 160 pages, 6 €

 

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