Notre besoin de consolation est impossible à rassasier
Le suédois était obsédé par de douloureuses questions existentielles. Toute son œuvre est empreinte de ce désir d’approcher au plus vrai du rebord de son existence, les yeux grand ouverts. Pour lui, la vie est si précieuse qu’il ne peut être question de la déprécier en la vivant au rabais.
L’homme est déchiré, la foi, la liberté, l’écriture, l’autre, l’amour, la solitude, tout le ravage quand il s’agit d’affronter la réalité, sans les fards qui confortent et nous préservent. Puisque que oui, comment vivre un tant soit peu avec le monde, dans le monde et en paix avec soi, sinon en fermant les yeux la plupart du temps ?
Notre besoin de consolation est impossible à rassasier est minuscule, il ne fait que 12 pages, mais le propos est majeur et l’écriture superbe. Tout y est dit et c'est beau comme l'innocence : ciselé, cruel, humaniste, libre, implacable intellectuellement. Aucune complaisance avec lui-même. Il veut vivre, éperdument mais ne peut [… Mais l’humanité n’a que faire d’une consolation en forme de mot d’esprit : elle a besoin d’une consolation qui illumine ..]
Je ne suis pas d'accord avec la formulation de Philippe Rhami sur Remue-net , il écrit ceci : [...Les douze pages de Notre besoin de consolation est impossible à rassasier soufflent un air saturé par le mal où un esprit se meurt.] Non, je ne crois pas, l'esprit de Dagerman ne meurt pas dans ces pages, loin de là, cet esprit est terriblement vivant, à lui survivre, même.
Il faut lire ce minuscule essai Notre besoin de consolation est impossible à rassasier pour se préserver du pouvoir anesthésiant d’une société qui nous chosifie. La mémoire de Dagerman est sans nul doute un contrepoison. Ce n’est pas faire l’éloge de la désespérance que de louer ce texte, mais celui du vouloir vivre.
Anne Bert
Stig Dagerman - Notre besoin de consolation est impossible à rassasier - Actes Sud - 1989 - 20 pages - 4,10 euros
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