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Dante : Biographie


Biographie de Dante Alighieri (1265-1321)

 

Dante Alighieri naquit à Florence en mai 1265. L'histoire de cette ville et des passions politiques qui l'agitèrent est trop intimement liée à la vie du poète et à son œuvre pour qu'il ne soit pas nécessaire de la rappeler brièvement.

 

L'Italie fut, au XIIe et au XIIIe siècle, le théâtre où se joua le grand drame de la rivalité de la Papauté et de l'Empire, l'Empereur travaillant à renouer l'antique tradition qui le faisait roi de Rome et maître de la péninsule, le Pape cherchant à briser cette tyrannique ambition et à diriger les destinées du pays. Ces deux doctrines rangèrent les cités et les hommes en deux partis, les Gibelins derrière l'Empereur, les Guelfes à la suite du Pape. Mais ces termes ne furent jamais bien clairs et perdirent de plus en plus de leur précision. On était guelfe ou gibelin autant par rivalités de villes, ambitions politiques, haines privées, que par conviction et système. Ce qu'on peut dégager de plus net c'est qu'à Florence le parti gibelin fut de bonne heure celui de la noblesse militaire et féodale, tandis que les Guelfes comprenaient la bourgeoisie active et laborieuse, avide de libertés communales et, d'indépendance. Et l'histoire de la ville n'est autre chose, à travers les péripéties, les vengeances et les proscriptions, que l'acheminement vers une organisation démocratique. Les deux partis connurent tour à tour le triomphe et l'exil. Mais une fois bannis, ces « fuorusciti » ne vivaient plus que d'une idée et d'un espoir : rentrer dans leur ville et en chasser leurs adversaires.

Cependant, malgré l'acharnement de la lutte, malgré un bref retour des Gibelins, soutenus par le roi Manfred, après la bataille de Montaperti en 1260, les Guelfes finirent par dominer et consolider leurs institutions au cours de laborieuses étapes, créant un jour les Corporations des Arts et contraignant une autre fois les nobles à s'inscrire dans ces corporations, sous peine de ne jamais occuper une charge publique. Une dernière tentative des Gibelins exilés, soutenus par la ville d'Arezzo, fut arrêtée par la victoire de Campaldino en 1289 et, en 1293, les Ordinamenti di giustizia de Giano della Bella qui excluaient à jamais les nobles de l'exercice des magistratures, marquent le triomphe définitif du parti populaire. Mais, suivant une loi presque fatale des mouvements révolutionnaires, si la victoire d'un parti fait disparaître parfois les grandes luttes de doctrine, elle suscite aussitôt des divisions nouvelles, souvent plus âpres et plus violentes, car elles reposent sur des questions de personnes et des ambitions intéressées. Au sein du parti guelfe ces divisions dressèrent l'une contre l'autre à Florence les deux maisons des Cerchi et des Donati et cet antagonisme créa deux fractions nouvelles qui empruntèrent leurs noms de Blancs et de Noirs aux sanglantes luttes qui avaient mis aux prises, à Pistoie, deux branches d'une même famille. Les désordres, les embuscades, les rencontres de gens armés, les accusations recommencèrent. Les Guelfes noirs invoquèrent l'appui du Pape, prétendant que leurs adversaires étaient des Gibelins déguisés. Boniface VIII

envoya comme pacificateur le prince Charles de Valois qui favorisa les Noirs. Et lorsque ces derniers furent maîtres de l'administration de la ville, ils usèrent de terribles représailles : les chefs des Blancs furent proscrits en 1302.

 

Telles étaient les passions orageuses et les grandes convulsions qui secouaient Florence, lorsque Dante y naquit.

 

On n'a guère de renseignements certains sur sa vie que ceux qu'il a lui-même donnés et qui sont épars dans ses œuvres. Il vante l'origine romaine et la noblesse de sa famille qui était guelfe. Son père s'appelait Alighiero Alighieri, sa mère Donna Bella et lui-même reçut le prénom de Durante, qui s'est abrégé en Dante.

 

Il passa son enfance et sa jeunesse à Florence et reçut une éducation soignée qui comprenait, outre l'étude des lettres, le dessin, le chant et l'équitation. Il s'adonna de bonne heure à la poésie et se lia d'amitié avec les meilleurs esprits de son temps, les poètes Cino da Pistoia, Guido Cavalcanti, le musicien Casella et le peintre Giotto. Il eut encore les précieux conseils et les encouragements d'un homme de grande culture et de goût, Brunetto Latini.

 

En 1289 il prit part à l'expédition contre les Gibelins d'Arezzo et se battit à Campaldino et au siège de Caprona, enlevée à Pise. Le fait le plus saillant de sa jeunesse fut son amour pour une jeune Florentine, Béatrice, qu'il a célébrée dans la Vita Nuova. Quelques autres passions sentimentales l'agitèrent encore. Puis il se maria vers 1295 avec Gemma Donati dont il eut plusieurs enfants. Gemma ne semble pas avoir occupé une grande place dans le cœur ni dans l'esprit du poète ; il n'y fait jamais la moindre allusion.

 

Vers la même époque il entre dans la vie politique. Inscrit dans la Corporation des médecins, il fait d'abord partie des conseils de la commune sans y jouer de rôle bien en vue.

 

Mais les circonstances allaient le jeter en pleine mêlée. Son nom sortit parmi ceux des Prieurs de la ville en juin 1300. C'est le moment critique dont il est question plus haut où la lutte devint ardente entre les Blancs et les Noirs. Dante était du parti des Blancs et on peut deviner avec quelle passion il se jeta dans la bataille, par la violence et la sévérité avec lesquelles il parle de Boniface VIII dans la Divine Comédie.

 

Lorsque, grâce à Charles de Valois, les Noirs l'emportèrent, Dante fut compris parmi les chefs du parti adverse, accusé de concussion (baratteria) dans l'exercice de son priorat et condamné à une amende de 6 000 livres, à deux ans d'exil et à l'exclusion de toute fonction publique. Cette sentence, prononcée le 27 janvier 1302, frappait Dante au moment où il se trouvait en ambassade auprès de Boniface VIII, pour essayer de fléchir la colère du pape. Le 10 mars une nouvelle sentence était prise, le condamnant au bannissement perpétuel et à être brûlé s'il tombait vivant entre les mains des Noirs. Dante partit donc sur l'amère route de l'exil. Il se trouva ainsi rapproché des autres « fuorusciti » gibelins par la force des circonstances, par le désir de rentrer dans sa patrie et par la haine qu'il avait vouée à ses ennemis.

 

Après s'être associé à quelques entreprises infructueuses en 1302-1303, il ne tarda guère à se séparer de tels alliés, incapables d'oublier leurs mesquines rivalités et d'assurer par la loyauté et la discipline le succès de leur cause. Dédaigneux et solitaire, « il fit un parti à lui seul » et commença ses tristes voyages de ville en ville, de porte en porte, en quête d'un asile, ne trouvant de consolation que dans l'étude et dans la préparation de son grand poème. C'est une douloureuse odyssée qui le mène de Vérone à Lucques, à la Lunigiane, à Paris même, bien que ce dernier séjour ne soit pas établi d'une manière indiscutable. Un instant il crut, avec tous les Gibelins, que la venue en Italie de l'empereur Henri VII, en 1310, lui permettrait de rentrer à Florence. Mais la mort de l'empereur ruina ce dernier espoir. Cependant sa condamnation à l'exil était renouvelée après son refus de rentrer à Florence, lors d'une amnistie dont les conditions étaient trop humiliantes pour que son âme hautaine pût s'y plier. C'est à cette occasion qu'il aurait écrit une lettre noble et fière à un religieux de ses amis, pour lui exposer les raisons de son refus.

 

Il passa les dernières années de sa vie tantôt à Vérone, tantôt à Ravenne, où il fut accueilli affectueusement par le prince Guido Novello da Polenta. C'est dans cette dernière ville qu'il mourut le 14 septembre 1321 et ses cendres y sont restées malgré les vives instances de Florence.

 

 

[Lectures littéraires. Pages choisies des grands écrivains : Dante / traduction, résumés et commentaires par Albert Valentin. Librairie Armand Colin, 1913]

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1 commentaire

Tu pourrais écrire un livre Comment prendre parti dans un conflit historique: «le Pape cherchant à briser cette tyrannique ambition et à diriger les destinées du pays.» lol! Le pape qui cherchait à annexer Florence, bref à la mettre sous sa botte, parce qu'elle avait commit le crime d’acquérir son indépendance politique... t'en aurait- pas un peu contre les démocratie desfois? Guelfes ou gibelins, personnes étaient des anges dans ce conflit, franchement tu pourrais de forcer à parler des deux côtés de la médaille! Sans parler que tu résume la vie de Dante à un squelette de clichés, tant qu'à écrire sur un fameux poète-philosophe et politicien qu'on connait trop bien ou qu'on ignore totalement (c'est tout l'un ou tout l'autre) tu pourrais être plus exhaustif et juste dans tes jugements... La phrase «il fit un parti à lui seul» fut mit dans la bouche du trisaïeul du poète pour vanter son incorruptibilité morale, pas tant parce qu'il était «Dédaigneux et solitaire».


Au fait... pourquoi t'as écrit cet article?