Gérard Titus-Carmel : préludes

Le premier texte de G. Titus-Carmel (écrit en 1966) éclaire le demi-siècle de création ultérieure de l'artiste. Dès ce conte l’auteur sonde l’obscurité des êtres que les mots tentent de fracasser. Il pénètre des gouffres pour qu'en jaillisse des arpents de lumière.

Le poète se transforme en « Chac-Mool de la ville bleue, nanti des bonbonnes d’oxygène qui me permettront de nager des heures entières sous l’océan, draguant le fond sans relâche, en compagnie de mes petits amis glauques, avec leur tuyau de caoutchouc planté dans le dos et leurs lunettes. ». Bref il se fait nu.
C'est la posture propice à ce qu'il nommera plus tard L’élancement en des successions d'exaltations et de fureurs, de rêves déraisonnables et vertiges, à la seule fin de se recomposer un corps.

Ce premier séjour aux abysses donne au poète l'allure d'un post surréaliste au sein d'une « rêverie hagarde et anglo-normande » où le verbe est habite des grottes d’oublis .Les sensations prennent un nouveau sens là où il n’existe plus d’issues ou directions. Le sol quitté une errance est là pour parcourir sous l’écume des rives inconnues à la recherche d’une paix que l’auteur espère à mesure s’il s’enfonce dans les abimes en nageant entre deux eaux face à un monde rendu méconnaissable au sein de cette profondeur.
Néanmoins la musique des mots rend le texte moins effrayant que souverain en une grande étendue d’eau noire mais scintillante et à perte de vue là où les berges reculent à mesure qu’on s’y avance et ignorant quelle pourrait être notre prière, ni pour qui, ni pourquoi.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

Gérard Titus-Carmel, Un rêve en éclat, Fata Morgana, 2018

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