"Napoléon et la campagne de France de 1814", le dernier sursaut


Jacques-Olivier Boudon, professeur d’histoire à l’université Paris IV s’est plutôt fait remarquer dans le champ des études napoléoniennes par ses ouvrages sur les mentalités religieuses (par exemple Napoléon et les cultes en 2002 chez Fayard). Il nous donne ici, bicentenaire de la campagne de France oblige, un livre sur les événements militaires de l’année 1814 qui menèrent Napoléon à l’abdication. Il rappelle aussi à quel point cette campagne dévasta certaines régions françaises


Une situation stratégique défavorable


Napoléon et la France sont en mauvaise posture au début de 1814. Depuis la défaite de Leipzig, l’Allemagne est perdue et les alliés disposent désormais d’une supériorité numérique écrasante (rapport de 1 à 3, voire 4) sur l’armée française. Celle-ci, comme le rappelle M.Boudon, est dispersé sur plusieurs théâtres d’opérations : sud de la France et Catalogne, Italie, Belgique, sans oublier les garnisons laissés par Napoléon dans certaines ville d’Allemagne (Davout à Hambourg). Après avoir proposé le retour aux frontières naturelles (incluant Belgique et rive gauche du Rhin), les alliés proposent à Napoléon une paix avec les frontières de 1792. L’Empereur tergiverse et la campagne commence. Tactiquement, Napoléon redevient Bonaparte et bat chaque corps d’armée qui lui est opposé : Montmirail, Champaubert… Ces victoires font douter les alliés mais provoquent surtout chez le vainqueur des poussées d’optimisme qui empêchent Caulaincourt de négocier sur la base des frontières naturelles. Porté par le nombre, les alliés prennent Paris le 30 mars 1814. C’en est fini de Napoléon.


Les souffrances des populations civiles


L’ouvrage souligne combien les campagnes de l’est de la France souffrirent de la guerre : réquisitions, villages réduits en champ de bataille… et violences contre les civils. Malgré des consignes édictées par les autrichiens et le tsar Alexandre 1er, les soldats alliés pillent, violent à un tel point que des paysans se révoltent sur les arrières des troupes alliées et tuent les traînards. Jacques-Olivier Boudon rappelle  que les alliés craignaient que la France retrouve son élan de l’an II et aussi que les paysans se révoltent, sur la modèle de l’Espagne de 1808. Les violences prussiennes durant la guerre de 1870-71 ont, du point de vue historiographique, occulté la mémoire de ces souffrances populaires (pour autant le souvenir des cosaques est resté peu reluisant…)


Le dernier coup d’archet de Napoléon


En conclusion, rappelons que nombre d’historiens ont comparé la campagne de France menée par Napoléon au début de l’année 1814 à la campagne d’Italie, principalement par le nombre de victoires remportés contre les alliés sur un cours laps de temps. La différence entre les deux campagnes est que l’armée de Napoléon souffre du déséquilibre numérique en faveur des alliés. Ces victoires, qui ne font que retarder l’échéance, sont remportés sur un terrain qui sera également le lieu des affrontements de la première guerre mondiale (également commémorés cette année).


Reste le génie du grand stratège et la gloire, qui fit rêver des générations entières…


Sylvain Bonnet


Jacques-Olivier Boudon, Napoléon et la campagne de France, Hors collection Armand Colin, janvier 2014, 336 pages, 20 € 

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