Marcher pour se (re)construire selon Bernard Ollivier

Marcher, comme antidote à l'abandon, à la délinquance, à la voie sans issue. L'écrivain normand Bernard Ollivier, après avoir parcouru à pied la route de la Soie soit 12000 km d'Istanbul à Xi'an,
fonde l'association Assoseuil en 2000. Son objectif : faire marcher des adolescents en déroute, souvent bien connus des services judiciaires. Ils relèvent soit de l'ASE (l'aide sociale à l'enfance), soit de la PJJ (la protection judiciaire de la jeunesse). Ils ont volé, violé, détruit, saccagé, dealé. L'avenir ? Ils n'en ont pas. La prison, les centres éducatifs fermés, telle est leur vie.


Bernard Ollivier leur propose une alternative et les fait marcher. Une centaine de jours de marche, plus de mille kilomètres à parcourir. En Espagne, en Italie. Le projet est louable mais est-il efficace ? C'est la question sur laquelle se penche Bernard Ollivier dans son dernier ouvrage « Marche et invente ta vie ». Il fait un premier bilan public. Il y a les pionniers, les filles, les récidivistes, les volontaristes, les « estropiés magnifiques » et ceux pour lesquels la marche restera inachevée. Pour être plus précis : « le cabinet indépendant qui, en 2013, a examiné à la loupe toutes les marches Seuil réalisées en 2012 estime que 63% des jeunes reviennent avec un projet et une bonne image d'eux-mêmes. Un seul jeune avait récidivé l'année suivante. A comparer avec les 85% de récidive des jeunes sortant de prison dans les douze mois de leur libération... Sans oublier que la méthode, infiniment moins coûteuse, n'est jamais contraignante ».


4 euros d'argent de poche par jour, pas de MP3, le froid, parfois la pluie. Les conditions demandent souvent un vrai effort de la part du jeune. Ceux qui finissent- et ils sont nombreux- reviennent avec cet exploit d'avoir tenu autant de kilomètres. Riche de rencontres aussi. Ils en sont fiers. La confiance en soi est restaurée.


Une association sœur polonaise Nowa Droga (nouveau chemin) s'est créée avec l'aide de Seuil en 2012. Mais elle va encore plus loin, puisqu'elle propose au retour du jeune un stage de six mois dans une entreprise pour apprendre un métier et un contrat d'embauche d'un an dans la foulée. "C'est coûteux mais beaucoup moins que d'entretenir à mi-temps et à vie un asocial en prison."


Laurence Viémont


Marche et invente ta vie, Bernard Ollivier, éditions Arthaud, janvier 2015, 230 pages

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2 commentaires

J'avais été fortement impressionnée par la lecture de Marcher pour s'en sortir  par un collectif d'auteurs dont Bernard Ollivier, et par diverses émissions sur le sujet sur Radio France, tout comme par les enregistrements de carnets de route émouvants et passionnants, de  jeunes s ayant suivi ce programme, documents sonores  que vous pouvez d'ailleurs écouter sur  cet article que j'avais consacré en 2013  à cette thérapie par la marche,  et à l'association.

Savez-vous si l'ouvrage que vous présentez est une réédition de Marcher pour s'en sortir , avec un autre titre ? 

Bonjour Anne, c'est bien un nouvel ouvrage. Dans le premier Bernard Ollivier explique la démarche d'Assoseuil, dans ce dernier, il dresse un bilan avec des années de recul autour d'une dizaine de portraits.