Francis Bacon sur la Riviera

Arrivé à Paris en 1927 pour s’installer dans le quartier de Montparnasse, sensible aux jugements du public français, Francis Bacon commence à exposer en 1946. Il reviendra régulièrement dans la capitale notamment pour la célèbre rétrospective tenue du 27 octobre 1971 au 10 janvier 1972 au Grand Palais. D’autres expositions personnelles sont organisées à Paris comme celles des galeries Rive Droite en 1957 et  Maeght en 1966. Il possède un atelier au 14 rue de Birague, dans le Marais. Comme un simple « piéton de Paris », il est détenteur en juin 1980 d’une Carte Orange. De nombreux auteurs, entre autres Michel Leiris dont il exécute en 1976 un portrait d’une grande intensité expressive et Gilles Deleuze s’intéressent à son travail et l’analysent. 


Comme rarement un artiste a pu et su le faire, Bacon unit à la dureté des sentiments la notion de fragilité de l’être et traduit comme nul autre « la tendre détresse de l’homme » perdu dans un espace où les repères se diluent et l’enserrent à la fois, « distendu par son désespoir et lové sur son désir ». Ses célèbres entretiens avec David Sylvester composent des textes fondamentaux. On ne peut s’empêcher de penser aussi à l’ouvrage d’Ernst van Alphen intitulé Francis Bacon and the loss of self publié en avril 2004. C’est sans aucun doute dans cette forme de marginalité que l’artiste a puisé cette puissance évocatrice de son propre combat et le discours crucial sur la modernité qu’il signe avec ses toiles. « Ses œuvres nous confrontent à la dualité entre la vie et la mort, le sacré et le profane, la victime et l’agresseur. Lorsque l’on questionnait l’artiste sur la violence de ses toiles, il ne cessait de répéter « la vie est tellement plus violente que tout ce que je peux faire», rappelle  Majid Boustany, à l’origine de cette institution destinée à faciliter les études sur le peintre.  

 

 

Parmi les lieux de prédilection de Bacon figure en effet Monaco où il se trouve lors du décès de son père en 1940. Cette destination va constituer à plusieurs reprises un ancrage marquant dans son existence et sa « seconde maison ». Il sera résident monégasque. L’ambiance propre à la Principauté, faite non seulement de luxe, d’élégance et de liberté mais aussi de lumière, de chaleur et de bon air le séduit et lui convient à plus d’un titres. Entre les bienfaits du climat, sa passion pour le jeu et son cercle d’amis, Bacon pourtant poursuit sans relâche son œuvre créatrice. Il réside dans différentes villas. Le jeu et la peinture partagent ses jours et vont avec ce qui les accompagnent fatalement, le hasard, le risque, la chance, associés « dans un huis clos terrible ».

 

 

Inaugurée en novembre 2014 par le Prince Albert, la Fondation est situé Villa Elise. Des peintures souvent peu connues, des photos, des dessins, des documents divers, du mobilier, beaucoup d’autres objets - plus de 2400 pièces - ayant appartenu au peintre ont été réunis. Ils invitent le visiteur à entrer dans le quotidien d’un homme qui déclarait que sa « méthode était de ne pas en avoir » mais savait parfaitement conduire son génie créatif. C’est l’occasion de connaître de l’intérieur celui qui avait une « écharde dans la chair ». Dans l’ouvrage, on trouve un tableau avec des dates précisant les séjours de Bacon dans le Midi, région qu’il parcourut de Marseille à Cannes et de Nice à Aix en Provence, cité où  il avait en 1986 participé à une exposition. Les étapes essentielles de sa vie sont également reprises de façon détaillée et chronologique à la fin.  

 

Dominique Vergnon

 

 

 

Majid Boustany, Eddy Batache, Martin Harrison, Francis Bacon MB Art Foundation, 70 pages, 20x27,5 cm, une trentaine d’illustrations, juin 2015, (le livre n'est pas disponible en librairie ; il est offert au visiteur de la Fondation ; www.mbartfoundation.com).

 

 

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